La prière selon Sédir

La prière selon Paul Sédir

Né en 1871, Sédir (Yvon Le Loup de son vrai nom) était un mystique et ésotériste français. Nombre de ses ouvrages sont consacrées à la mystique chrétienne.
Il fut évêque de l’église Gnostique de Jules Doinel. Proche de Papus il devint également martiniste et rosicrucien et fut membre du suprême conseil de l’ordre Martiniste de Papus.

Dans les années qui suivirent sa rencontre avec Maître Philippe de Lyon, Sédir choisit d’abandonner progressivement toute démarche initiatique pour se consacrer uniquement aux évangiles.
Il nous livre dans le texte ci-dessous sa conception essentialiste de la prière comme une communion constante des êtres et de la Nature avec l’Eternel.
La prière est l’entreprise la plus difficile qui puisse être proposée à l’homme. Cependant tout prie autour de nous : la pierre qui mûrit dans les ténèbres de la mine ne cherche-t-elle pas le jour ? La plante ne perce-t-elle pas le mur pour trouver la lumière ?
Les bêtes s’arrêtent devant le soleil une fois au moins par jour ; l’océan se soulève régulièrement à la rencontre des effluves séléniques qui le revivifient ; tous, ils demandent à la Nature l’entretien de leurs forces. L’athée prie, puisqu’il travaille ; le démon prie, puisqu’il convoite ; le caillou, puisqu’il s’efforce vers le cristal. Les peuples désirent le bonheur, les planètes aussi en S’inclinant sur leurs pôles ; notre intelligence elle-même n’est si vaste que parce qu’elle a beaucoup demandé. Est-ce à dire que chacun de ces êtres demande comme il faut ? Non ; la création tout entière est imparfaite ; mais elle a le sentiment de cette impuissance, et le pressentiment d’une stase plus haute.
Tout acte est une demande ; et tout être agit nécessairement, puisqu’il vit. Un résultat ne s’obtient pas à cause de notre volonté, mais parce qu’en travaillant à sa réalisation, nos énergies, les plus physiques mêmes, désirent et espèrent le succès.
Parmi les créatures, c’est l’homme qui refuse le plus souvent de reconnaître cette loi ; et c’est pourtant surtout à lui qu’elle s’applique. J’espère vous montrer combien une telle conduite est déraisonnable.
Comprise dans sa dignité réelle, la prière est un désir du Ciel et une conversation avec Dieu. Elle est une grâce et la source des grâces ; elle est une graine dans les terres de l’éternité, une œuvre plus précieuse que tous les chefs-d’œuvre, plus grande que le monde, plus puissante, pourrait-on dire, que Dieu Lui-même.
Ne vous étonnez point, nous quittons ici les royaumes policés de la raison, nous sommes dans les forêts luxuriantes de l’Amour. Faites taire l’intelligence ; ouvrez les fenêtres du cœur ; contemplez les champs infinis des collines éternelles. Que ne puis-je vous les rendre visibles !
Deux mouvements se produisent dans la prière. Le désir s’humilie, s’exalte et se réfugie dans la miséricorde divine qui est le Christ ; la grâce lui répond, s’efforce et se laisse dévorer par lui. Ces deux sont la forme mystique de la foi ; et plus le désir s’enfonce dans l’abîme d’humilité, plus il attire la grâce ; plus notre cœur se nourrit, plus le Verbe se développe au fond de nous.
La prière est l’élan de notre personnalité vers l’Absolu. Elle s’abandonne au Père, elle se jette dans Ses bras, elle converse avec Lui, mais sans paroles ; elle n’use pas l’intellect ; c’est le cœur qui a enfin touché son complémentaire total, qui s’étonne, défaille, meurt et renaît, dans une béatitude infiniment croissante.

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Pour qui n’est pas dans une logique religieuse, la prière est sans doute plus difficile à pratiquer que la méditation. L’une et l’autre sont bien pourtant une pratique. Une pratique de l’isolement, de l’auto-construction du temple intérieur, du retrait en son for intérieur. Une pratique de la suprême libération, de la liberté absolue de sa propre conscience.

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